Communiqué de presse concernant l'arrêt F-3116/2023
Compétences judiciaires clarifiées
Le Tribunal administratif fédéral précise à quelles conditions les décisions d’expulsion et d’interdiction d’entrée prononcées par fedpol pour maintenir la sécurité intérieure ou extérieure de la Suisse doivent être soumises à un contrôle judiciaire au lieu d’un contrôle administratif.

En décembre 2022, l’Office fédéral de la police (fedpol) a prononcé l’expulsion de Suisse et une interdiction d’entrée de vingt ans, valable également pour le Liechtenstein et l’ensemble du territoire de l’Espace Schengen, à l’encontre d’un ressortissant nord-macédonien suspecté d’être un islamiste radicalisé. En outre, une procédure d’instruction pénale ouverte par le Ministère public de la Confédération à son encontre est pendante. Considérant que cette décision devait déployer immédiatement ses effets, compte tenu de la menace que représentait l’intéressé, fedpol a retiré l’effet suspensif à un éventuel recours. L’intéressé a ensuite recouru contre cette décision devant le Département fédéral de justice et police (DFJP), requérant la restitution de l’effet suspensif. Le DFJP a rejeté cette requête en mai 2023, sans aucune indication de voies de droit. L’intéressé a finalement interjeté recours contre cette décision devant le Tribunal administratif fédéral (TAF) et, en parallèle, devant le Conseil fédéral.
Recours judiciaire ou recours administratif ?
Dans son arrêt de principe, le TAF précise à quelles conditions les décisions d’expulsion et d’interdiction d’entrée fondées sur l’article 68 de la loi fédérale sur les étrangers et l’intégration (LEI) peuvent faire l’objet d’un recours judiciaire au TAF, échappant ainsi aux voies de recours administratives devant le DFJP puis le Conseil fédéral. Il faut pour cela que la contre-exception prévue à l’article 32 de la loi sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF) trouve à s’appliquer. En d’autres termes, il faut que l’étranger puisse se prévaloir d’un droit à ce que sa cause soit jugée par un tribunal conféré par le droit international. Un tel droit peut découler notamment de l’article 13 CEDH, garantissant le droit à un recours effectif. Il faut toutefois que l’étranger invoque de manière défendable une disposition matérielle de la CEDH.
Dans le cas particulier, le recourant s’est prévalu, de manière suffisamment convaincante, de la présence en Suisse de son épouse et de leurs deux enfants, au bénéfice d’autorisations d’établissement, soit notamment de la protection de la vie familiale conférée par l’article 8 CEDH. Le TAF se déclare donc compétent pour connaître du recours formé contre la décision du DFJP. Au fond, il confirme le rejet de la requête en restitution de l’effet suspensif. La compétence du TAF s’étend également au recours formé contre la décision principale prononcée par fedpol en décembre 2022. De ce fait, le TAF invite le DFJP à lui transmettre le dossier du recourant pour qu’il poursuive la procédure de recours.
Cet arrêt est définitif et n'est pas susceptible de recours au Tribunal fédéral.
Contact

Rocco Maglio
Attaché de presse